« À force de parler d'amour, on devient amoureux. »
Pascal, penseur et mathématicien, grand observateur de la nature humaine, est-il l'auteur de ce
Discours sur les passions de l'amour ? C'est un discours mystérieux, où la mécanique contradictoire du sentiment est analysée avec la précision d'un traité de physique.
Il s'agit tout à la fois d'un art d'aimer et d'un portrait moral de l'amoureux.
Un livre à (re)découvrir, pour les passionnés de l'amour comme de l'esprit.
Pourquoi devons-nous travailler ?
Paul Lafargue (1842-1911), penseur socialiste, tente de comprendre l'amour absurde du travail, « cette étrange folie qui possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste ».
Relire Le Droit à la paresse nous rappelle que la liberté d'employer le temps est fondamentale.
Voltaire, premier défenseur des végétariens !
Le philosophe condamne la responsabilité des hommes dans la souffrances des bêtes. Elle révèlerait le rapport que nous avons au mal et à la douleur de l'autre.
Cet ensemble de textes constitue un plaidoyer percutant qui rejoint nos préoccupations actuelles, en questionnant nos modes de vie et nos pratiques alimentaires.
L'oisiveté (otium) n'était pas pour les Romains un vilain défaut mais, au contraire, le contrepoint nécessaire au negotium, à l'activité, celle des affaires courantes et extraordinaires, qui dilapident le temps et exacerbent les passions. Pour autant, pas question de « ne rien faire ». Pour le sage, être oisif, c'est choisir la retraite, l'exil intérieur et le repli sur l'activité méditative. Préférer l'étude de la nature et la contemplation, pour trouver le bonheur. Dans notre époque où tout va trop vite, apprenons à nous débrancher. Adoptons le programme de Sénèque.
« La durée de la vie de l'homme? Un point. Sa substance? Un flux. Ses sensations? De la nuit. Tout son corps? Un agrégat putrescent. Son âme ? Un tourbillon. Sa destinée? Une énigme insoluble. La gloire? Une indétermination. En un mot, tout le corps n'est qu'un fleuve ; toute l'âme, un songe et une fumée ; la vie, un combat, une halte en pays étranger; la renommée posthume, c'est l'oubli. Qui donc peut nous guider? Une seule et unique chose, la philosophie.»
Alors que Rome est menacée à ses frontières par les barbares, l'empereur Marc Aurèle (121-181) note chaque jour, dans un dialogue avec lui-même, les réflexions et les déceptions que lui inspire le monde. De grandes pages, émouvantes par leur humanité, qui disent les tourments d'un homme et la sérénité dans le stoïcisme.
Denis Diderot
L'ENCYCLOPÉDIE
50 ARTICLES FONDAMENTAUX
Édition établie par Jérôme Vérain
Anthologie inédite
On sait que Denis Diderot (1713-1784) fut de loin le principal artisan de l'Encyclopédie, ou Dictionnaire raisonné des arts, des sciences et des métiers. Resté seul, avec une équipe restreinte, après le départ de D'Alembert en 1759, il prêta la main à plusieurs milliers d'articles et en écrivit plus de 1 700 pour achever les 17 volumes en 1765.
Ce livre est la première édition séparée d'articles signés de Diderot. On y lit en condensé l'esthétique, la morale et la philosophie matérialistes qui lui valurent les foudres de l'Église et du pouvoir.
En cinquante articles fondamentaux se dessine un autoportrait du philosophe. Ses convictions, qui s'expriment prestement, débouchent sur une critique audacieuse des institutions et de la vie sociale. Diderot y formule des concepts et des revendications qui allaient nourrir la Révolution à venir.
Écrit de décembre 1851 à mars 1852 dans des conditions matérielles très précaires, Le 18 brumaire analyse l'histoire immédiate du coup d'État qui, le 2 décembre 1851, porte le neveu de Napoléon à la tête de ce qui va devenir le Second Empire. En plaçant le coup d'État dans son contexte économique, social et culturel, Marx nous en donne une interprétation brillante où il dévoile la nature d'un État vampire, animé par une caste de bureaucrates surnuméraires qui dévore la société civile. Cette intelligence claire des événements, au moment même où ils se déroulent, est, en efet, exemplaire.
L'oeuvre de Michel Foucault désoriente : considérée parfois comme celle d'un philosophe, parfois encore comme celle d'un historien ou d'un critique de la culture, elle ne cesse de déplacer ses choix méthodologiques, ses champs d'enquête et son outillage conceptuel ; elle surprend souvent par la beauté de son écriture ; elle irrite aussi, car ce voisinage avec la pratique littéraire dérange. Judith Revel propose un parcours dans la pensée foulcadienne qui prenne précisément pour guide cette apparente discontinuité des thèmes, des approches et des instruments. Nous avons fait le pari qu'il y avait à lire derrière l'éparpillement apparent des recherches une véritable pensée du discontinu : un travail philosophique exigeant, sans cesse relancé, sur l'expérience de la pensée et la problématisation de l'actualité ; une cohérence à la fois difficile et forte, qui traverse trente ans de pratique philosophique et nous enjoint plus que jamais à tenter cette ontologie critique de nous-mêmes dont Foucault demeure l'exemple à la fois le plus remarquable et le plus émouvant.
Longtemps considéré comme un"brouillon" de "L'Ethique", le "Traité", véritable méthode, d'ailleurs sous-titrée "Traité de la meilleure voie qui mène à la vraie connaissance des choses", délivre un message philosophique original : l'Homme peut être sauvé. Par quelque intervention divine, par quelque grâce de la Providence? Nullement. Par ses propres moyens, par ses propres forces. Telle est, sans doute, la thèse la plus "hérétique" de la philosophie de Spinoza, aujourd'hui encore inacceptable.
« Jetant un regard rétrospectif sur mon parcours intellectuel, autour d'un objet envahissant et problématique, l'économie, il m'apparaît que mes efforts ont visé à produire ce que les Grecs appelaient une metanoïa, c'est-à-dire un renversement de la pensée. Aujourd'hui, il nous faut renverser nos manières de penser. Parce que le monde n'est plus vivable ainsi, que nous le savons mais restons pris dans les schémas capitalistes et productivistes, il nous faut réinventer notre imaginaire pour trouver une nouvelle perspective existentielle. Qui passera par l'après-développement, la décroissance et l'éco-socialisme. »S. L.
Serge Latouche, professeur émérite d'économie à l'Université d'Orsay, objecteur de croissance, est notamment l'auteur du Petit traité de la décroissance sereine (Mille et une nuits).
Le Point fixe rassemble trois conférences prononcées en 2009 sur l'architecture dogmatique des sociétés. "Pour entrer dans ce champ de recherches, il est nécessaire de revenir vers l'Occident, traité ici à l'instar des civilisations qui se sont développées en dehors de la matrice judéo-romano-chrétienne. Étudiant le noyau dur de la constitution anthropologique euro-américaine, je propose un parcours en trois temps qui, partant d'une mémoire juridique plus de deux fois millénaire, aboutit au panorama des apports théologiques et politiques du christianisme à la domination planétaire occidentale. Entre ces deux pôles, un exposé intermédiaire examine l'exigence logique à laquelle l'espèce parlante est assujettie depuis la Préhistoire et sans discrimination géographique : l'impératif universel d'interpréter. Une préface méditative considère cet horizon et rappelle aussi l'élément à ne jamais oublier, un composant des civilisations : l'agressivité." P. L.
Aujourd'hui, l'intérêt individuel et privé règne dans les sociétés qui ne se définissent que comme la libre association d'individus dotés de droits. L'idée de bien commun a été évacuée. Pourtant, elle traduit un souci réel. Comment penser le bien commun dans un contexte où le politique est dominé par les puissances économiques et financières ? François Flahault retrace l'histoire de cette idée et expose comment, récemment, en réduisant la politique à une habile gestion des affaires publiques, elle a été écartée, et comment les droits de l'homme ont fini par l'évincer... Quand bien même les droits humains ne substituent pas à lui, car ils ne permettent pas de le penser : la Déclaration des droits de l'homme ne dit en effet rien de la finalité des sociétés humaines au-delà de leur utilité pratique, ni ce qui relie entre eux leurs membres. François Flahault redéfinit le bien commun sans faire appel à une quelconque transcendance et éclaire ainsi tous les enjeux actuels de l'existence sociale, autrement recouverts par l'économisme. En quoi coïncide-t-il avec le bien premier de chacun ? Comment s'articulent les liens et les biens ? Quelles sont les relations entre le bien commun (au singulier), les biens communs (au pluriel) et les biens privés ? Quels rapports entre économie marchande et biens communs ? Un État démocratique doit-il assigner une responsabilité aux pouvoirs économiques et financiers au regard du bien commun ? Faut-il, au nom de la liberté individuelle, laisser sans réponse la question de ce qu'est la « vie bonne » ?
L'impression que la déraison domine désormais les hommes accable chacun d'entre nous. Que la rationalisation qui caractérise les sociétés industrielles conduise à la régression de la raison (comme bêtise ou comme folie), ce n'est pas une question nouvelle : Theodor Adorno et Max Horkheimer nous en avertissaient déjà en 1944 - au moment où Karl Polanyi publiait La Grande Transformation.
Cette question a cependant été abandonnée, tandis qu'au tournant des années 1980, la rationalisation de toute activité, rapportée au seul critère de la « performance », était systématiquement et aveuglément orchestrée par la « révolution conservatrice » - imposant le règne de la bêtise et de l'incurie.
Tout en mettant en évidence les limites de la philosophie qui inspirait l'École de Francfort, le post-structuralisme laisse aujourd'hui ses héritiers désarmés devant ce qui s'impose comme une guerre économique planétaire et extrêmement ravageuse.
Naomi Klein a soutenu que la théorie et la pratique ultralibérales inspirées de Milton Friedman reposaient sur une « stratégie du choc ». L'« état de choc » permanent règne cependant depuis le début de la révolution industrielle - et plus encore depuis le temps où s'applique ce que Joseph Schumpeter décrivit comme une « destruction créatrice », caractéristique du modèle consumériste.
À partir des années 1980, sous l'impulsion de Ronald Reagan et Margaret Thatcher, l'état de choc technologique a été suscité par un marketing planétaire ne rencontrant plus aucune limite, imposant la prolétarisation généralisée, et détruisant l'économie libidinale : ainsi s'est installé le capitalisme pulsionnel où la destruction créatrice est devenue une destruction du monde.
L'état de choc est ce que le post-structuralisme n'aura pas pensé, principalement en raison de deux malentendus : 1. quant au sens de la prolétarisation (que Marx pense avant tout comme une perte de savoir induite par un choc machinique), 2. quant à la nature de l'économie libidinale (au sein de laquelle Freud, à partir de 1920, distingue la libido de la pulsion).Bernard Stiegler, philosophe, est notamment l'auteur de La Technique et le Temps, Mécréance et discrédit, Prendre soin. De la jeunesse et des générations et Ce qui fait que la vie vaut la peine d'être vécue. Depuis 2006, il dirige l'Institut de recherche et d'innovation (IRI) et préside l'association Ars Industrialis, Association internationale pour une politique industrielle des technologies de l'esprit.
Pierre Legendre, historien du droit et philosophe, s'attache, au-delà du cas spécifique des sociétés occidentales, à cerner, nommer et décrire les structures anthropologiques primordiales qui font la cohésion des groupes humains en sociétés. De quoi est donc faite cette « colle », qui permet que cela tient ensemble ? aime-t-il dire familièrement. Dans deux conférences inédites, prononcées à l'automne 2011 et au printemps 2012, il revient à la charge, et, met au jour ce soubassement qu'il nomme le Fiduciaire. Dans sa première conférence, il explique pourquoi il importe de prendre ses distances avec le concept occidental de « Religion », tout à fait usé, qui ne permet plus de comprendre notre civilisation et nourrit les malentendus avec les autres. Il donne les premiers « Éléments pour une théorie du Fiduciaire », terme juridique d'origine romaine qui désigne un montage triangulaire, assurant le transfert d'un bien et mettant en jeu deux personnes engagées vis-à-vis d'un garant. Une fois l'obstacle du mot religion levé, il peut faire retour sur les figures du garant qui accompagnent depuis toujours l'humanité, autour desquelles se constitue le lieu de la légitimité et se déploie le théâtre de la parole. Car, les mots sont un « mode de présence qui ne se discute pas » ; on a foi dans les mots ; « l'autorité des mots est fiduciaire ». Fonder l'autorité des mots est un enjeu fondamental. Dans la seconde, intitulée « La politique, le droit. Le silence des mots », il revient sur la manière dont l'Occident a posé et interprété la question « Qu'appelle-t-on gouverner ? » : c'est toute notre histoire, que le reste du monde regarde avec les lunettes de ses multiples traditions.
Ce pamphlet est né d'un agacement, celui de voir parader sans vergogne, à longueur de médias, une ribambelle d'humoristes d'un nouveau genre, moins amuseurs que donneurs de leçons, moins « comiques » qu'agents autoproclamés du Bien.
Ils éreintent mais sans risque, ils accusent, ridiculisent, frappent de dérision sans ménager la moindre possibilité de défense. Des procureurs hargneux, dans des procès joués d'avance. Le sérieux, voilà l'ennemi.
Ils règnent à la radio, à la télévision, dans la presse écrite, publient des livres, font des films, achètent des théâtres... C'est une nouvelle féodalité, avec ses prébendes et ses privilèges.
C'est un nouvel intégrisme, celui de la rigolade. Il faut rire de tout mais avec eux. Le rire, « leur » rire est la norme. À les écouter, ils seraient l'actuelle incarnation de la liberté d'expression et de toutes les valeurs réunies de la démocratie. On croit rêver... Leurs saillies sont pourtant d'une incroyable platitude et leurs prêchi-prêcha, troussés à la va-vite, épargnent les vrais puissants. Curieuse époque que la nôtre, qui voit le « bas-bouffon » tenir lieu de conscience et de pensée.
Qui a jamais persuadé son prochain à force d'arguments ? Au cours d'une vie, rares sont les moments où l'on se laisse convaincre et où l'on parvient à emporter l'adhésion de notre interlocuteur, préalablement fortement attaché à une opinion autre que la nôtre.
La rhétorique, traditionnellement définie comme l'art de persuader par le discours, se révèle être une science qui ne remplit pas l'objectif qu'elle se donne. Si l'on s'arrête à cette définition, les premières objections se font jour.
Les hommes argumentent constamment, et en toute circonstance, mais à l'évidence ils se persuadent assez peu mutuellement. Du débat politique à la querelle de ménage, de la dispute amicale à la polémique philosophique, c'est l'expérience constante que l'on en a. Peut-être du temps d'Aristote et des sophistes le rhéteur persuadait-il ses concitoyens à coups de sorites, d'enthymèmes et d'épichérèmes ? Il semblerait qu'aujourd'hui cela ne marche plus.
Ce constat pose une question dirimante à cette science séculaire : qu'en est-il d'une science aussi faillible ? Puis d'autres questions viennent à l'esprit. Pourquoi, se persuadant rarement, les hommes persévèrent-ils à argumenter ? Non seulement ils échouent dans leur stratégie de persuasion, mais rien ne saurait les décourager. Ils persistent à soutenir des controverses interminables, faites d'échecs répétés. Pourquoi ces échecs ? Qu'est-ce qui ne va pas dans le raisonnement mis en discours ? Alors que dans les situations de communication, le message parvient à son destinataire, et qu'il est entendu ? Pourquoi lorsque l'on argumente le message passe-t-il si mal ? Toutes ces questions ont longtemps été laissées de côté par la philosophie, empêtrée dans une succession de controverses qui opposèrent la plupart de ses grandes figures.
Marc Angenot nous propose d'explorer l'univers de la mécompréhension dans la volonté de persuader, d'en analyser les mécanismes, de répertorier les formes du raisonnement logique et celles des errements illogiques, et de nous éclairer quelques cas de dialogues de sourds qui marquèrent l'histoire de la philosophie. Cet ouvrage en vient à poser, in fine, la question de l'universalité de la raison raisonnante et à en dessiner les limites.
L'auteur traverse de nombreux types de discours - du juridique au judiciaire, en passant par le politique et l'historique (question du discours négationniste) - pour illustrer son propos.
Jean-Baptiste Cloots, dit Anacharsis Cloots, connut une trajectoire unique durant la Révolution française. Issu de la noblesse allemande d'origine hollandaise, il s'installe en France en 1789, à l'âge de trente-quatre ans, pour prendre part aux événements politiques en cours. Théoricien de la liberté radicale, il se fait élire député de l'Oise, participe aux travaux de rédaction de la Constitution de la Ière République, il est même brièvement élu président du Club des Jacobins. D'emblée, il cherche à appliquer les idéaux de la Révolution à l'humanité et à étendre le projet de constitution au monde entier.Rédigées en 1793, Les Bases constitutionnelles de la République du genre humain défend la thèse suivante : si les principes de la Révolution française prétendent être absolus, il n'y a pas de raison que leur application soit limitée à un pays ; par là-même, ils font advenir une « république universelle ». Aussi la Révolution aboutira-t-elle nécessairement à ce qu'il appelle la « sans-culotterie universelle ».Anacharsis Cloots est le premier penseur à réfléchir à l'idée d'un constitutionnalisme mondial - idée aujourd'hui passée dans le champ du droit international et de la gouvernance mondiale. Sa vision, portée par un optimisme politique et moral certain, fait exploser les cadres alors en vigueur d'un constitutionnalisme valable dans les frontières des royaumes et des Etats. Ce précurseur adopte une position unique dans l'histoire de la pensée politique. Nombre d'auteurs (notamment Kant avec son thème de la « Weltrepublik ») s'en servent comme repoussoir théorique. Considéré comme un idéaliste, il est condamné par Robespierre quelques mois seulement après la publication de l'ouvrage pour son universalisme radical. Il est guillotiné à Paris le 24 mars 1794.
Dans ce traité, resté inédit de son vivant, Vauvenargues reprend à nouveaux frais l'éternelle question du libre arbitre. Le verdict est formel : la liberté individuelle n'est qu'une illusion gratifiante !
L'homme, parce qu'il est avide d'agir, s'imagine libre de faire ce qu'il veut, oubliant au passage sa dépendance foncière à l'égard de la nature. Loin d'être autonome, la volonté obéit à son insu aux injonctions contradictoires des désirs. Les sentiments et les pensées se bousculent en nous hors de tout contrôle conscient.
Avant Freud, Vauvenargues montre ainsi que le moi n'est pas maître dans sa propre maison. Une stricte nécessité gouverne notre corps et ce que nous appelons liberté se réduit au fait de suivre docilement les « lois de notre être ». Plutôt donc que de se rêver acteur de son destin, il faudrait accepter l'idée qu'on est un simple jouet de la nature. Mais un jouet consentant et heureux !
Kant semble avoir vécu dans la chasteté la plus cmplète. On ne lui connaît ni épouse ni maîtresse. C'est du moins ce que prétendent ses biographes.
Philosophe français méconnu, Jean-Baptiste Botul (1896-1947) s'est penché sur ce délicat problème à l'occasion de conférences prononcées en mai 1946 au Paraguay. Il y expose pour la première fois la thèse selon laquelle "les philosophes ont inventé un moyen extraordinaire de se reproduire : ils ne pénètrent pas, ils se retirent. Ce retrait porte un nom : la mélancolie".
Ce texte retrouvé dans les archives de Botul, qui éclaire d'un jour nouveau La Vie sexuelle d'Emmanuel Kant, est ici présenté par Frédéric Pagès, agrégé de philosophie.
Le bonheur est-il dans le plaisir, comme le pense Épicure, ou bien consiste-t-il, ainsi que l'affirme Aristote, dans « une vie conforme à la vertu » ? Ne le possédons-nous, avec Augustin, que « dans l'espérance », selon « un progrès perpétuel » (Leibniz) ou est-il, comme le dit joliment Albert Camus, « un hasard qui se prolonge » ?Qu'il s'agisse d'en définir la nature, les modalités ou encore la vanité de sa recherche, les philosophes ont écrit sur le bonheur des réflexions aussi riches que variées. C'est le sujet que chacun entend trancher sans parvenir jamais à l'épuiser.À travers un choix original de textes philosophiques, classiques ou peu connus, cette anthologie originale propose à chacun, plutôt que d'improbables recettes du bonheur, de reprendre pour lui-même - en philosophe - l'énigme de ce qui semble bien la grande affaire de l'humanité.
Une théorie des victimes n'existe pas encore comme telle dans la philosophie qui s'intéresse davantage à la force, à la puissance et à la domination. Elles sont devenues un objet privilégié des intellectuels qui assument leur défense, mais aussi des médias qui les actualisent et en témoignent. Une théorie un peu rigoureuse supposera que la Victime-en-personne est la condition symbolique qui détermine la victimologie toute pénétrée de philosophie.
On dessine deux figures de l'intellectuel. L'intellectuel médiatique sous dominance philosophique ultime, engagé ou embarqué (« embedded ») par le pouvoir, qui se contente de représenter les victimes, de les photographier par la parole, l'écrit ou l'image. Et l'intellectuel générique qui travaille sous la condition déterminante de la victime plutôt que de la philosophie.
Nous examinons différents aspects de l'intellectuel, son malaise et sa trahison en fonction de la victime. Puis la victimisation comme processus de la double peine infligée à la victime, les notions de « force faible » et de « force forte », de « survivant » et de « ressuscité » le problème de la persécution et de l'extermination (pourquoi tue-t-on ?). Il s'agit de fonder l'éthique sur la victime plutôt que sur la force philosophique. La compassion n'est pas la pitié philosophique des animaux participant à la vie universelle, c'est le dernier vécu, celui du vaincu qui longe la mort et lui donne encore son sens. Une autre idée de l'homme, nous l'appelons « générique ».
Les 27 et 28 novembre 2007 s'est tenue au centre Pompidou à Paris la première édition des Entretiens du nouveau monde industriel. Cette manifestation, unique en France, a pour objectif d'analyser les tendances caractéristiques de notre époque, par où se transforme très profondément une société industrielle confrontée à de nouvelles limites, mais aussi portée par d'autres dynamiques - situation complexe et contradictoire au sein de laquelle il s'agit d'ouvrir des perspectives.
Les Entretiens ont porté sur les enjeux aussi bien de ce que l'on appelle l'innovation ascendante que du façonnage de nos existences par les transformations industrielles à l'heure des technologies numériques (comme technologies cognitives et comme technologies culturelles), et à l'aube des technologies que l'on dit « transformationnelles » (qui sont les biotechnologies et nanotechnologies).
Les mutations en cours et les contradictions qu'elles génèrent imposent de repenser les pratiques de la recherche & développement et du design - terme entendu ici dans un sens élargi, et qui s'applique désormais à tous les aspects de nos existences. Quelles en sont les implications politiques, sociales et économiques ? En quoi le modèle industriel lui-même s'en trouve-t-il transformé ?
Celui-ci, forgé au XIXe siècle, a conduit après la Seconde Guerre mondiale à la planétarisation de la société de consommation. Or, il semble de nos jours à la fois rencontrer ses limites et ouvrir de nouvelles possibilités en renversant l'opposition producteur/consommateur (en particulier, dans le domaine du numérique) et en conférant à la matière aussi bien qu'au vivant une plasticité jusqu'alors inconcevable. Le design devient de fait une activité de sculpture de l'individu et de la société qui lui ouvre et lui assigne des perspectives et des responsabilités sans précédent - aussi exaltantes qu'écrasantes.
Une nouvelle relation entre conception industrielle et pratiques quotidiennes de l'existence est en cours de définition.
" Quand la loi a rendu tous les hommes égaux, la seule distinction qui les partage en plusieurs classes est celle qui naît de leur éducation. [...] le fils du riche ne sera point de la même classe que le fils du pauvre, si aucune institution publique ne les rapproche par l'instruction." la révolution, et l'abolition des inégalités, se révèlerait bien vite insuffisante si elle ne se prolongeait pas par une lutte contre l'ignorance, première condition pour jouir de la liberté.
Soucieux des limites de la Constitution de 1791, Condorcet (1743-1794) publie cinq mémoires sur l'instruction publique dans un périodique créé avec quelques amis, La Bibliothèque de l'homme public. Son Premier Mémoire, qui établit les principes de gratuité, de laïcité et d'égalité devant l'accès au savoir, fait de Condorcet le père de l'école républicaine.
Le 1er novembre 1755, un séisme suivi d'un raz-de-marée et d'un incendie ravage la ville de Lisbonne (Portugal). On dénombre 50 000 victimes. Cette catastrophe marque les consciences et suscite un débat philosophique à travers toute l'Europe : un tel drame est-il le fruit de la colère divine, donc de la Providence ? Voltaire voit dans cette manifestation naturelle l'occasion de réfuter les thèses optimistes proposées par Leibniz dans la Théodicée, Tout est bien ! Or, pour Voltaire, non seulement la souffrance des hommes est inacceptable, mais cette thèse est synonyme d'un danger redoutable, le fatalisme et son cortège de superstitions ridicules. Voltaire envoie son poème sur la Loi naturelle et la Providence à un Rousseau qui vient de faire parler de lui avec son Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité. Rousseau est irrité passablement par le tableau misérabiliste. Par réaction, il se pique de défendre Leibniz. Il lui fait un procès en désespérance de l'humanité : l'homme souffre un destin injuste par la Nature. C'est le début de la brouille définitive et de la haine des deux hommes.