Que signifie être responsable de ses actes ? Dans ce texte court et élégant, Giorgio Agamben propose une généalogie de nos croyances morales. Ce n'est pas la liberté qui fonde la responsabilité, mais une articulation entre le droit et la punition caractéristique de l'Occident. Pour comprendre ce qu'est une " cause " et pourquoi l'homme est considéré comme la cause de ses actions, il faut en revenir à la scène inaugurale du procès. Derrière la morale, on découvre la cruauté pénale. L'auteur d'Homo Sacer poursuit sa remise en cause du dispositif juridique qui enserre les vies humaines. Pour la première fois, il confronte ce dispositif à la tradition bouddhiste. De proche en proche, c'est une tout autre conception de l'action qui s'énonce dans ce livre.
Giorgio Agamben, philosophe, a enseigné à l'université de Venise et est chercheur associé au Centre d'études des normes juridiques Yan Thomas (EHESS). Il est l'auteur d'une œuvre considérable, dont, publiée au Seuil en 2016, l'intégralité des neuf livres constituant le projet Homo Sacer.
Traduit de l'italien par Joël Gayraud
Avec ce livre se conclut le projet Homo Sacer commencé en 1995, qui a marqué une nouvelle direction dans la pensée contemporaine. Après les enquêtes archéologiques des huit volumes précédents, sont repris et définis ici les idées et concepts qui, durant presque vingt ans, ont conduit Giorgio Agamben à mener sa recherche dans un territoire inexploré dont les frontières dessinent un nouvel usage des corps, de la technique, du paysage. Au concept d'action, que nous sommes habitués depuis des siècles à placer au centre de la politique, se substitue ainsi celui d'usage, qui renvoie non à un sujet, mais à une forme-de-vie ; au concept de travail et de production, se substitue celui de désœuvrement – qui n'a pas le sens d'inertie, mais d'une activité qui désactive et ouvre à un nouvel usage les œuvres de l'économie, du droit, de l'art et de la religion ; au concept d'un pouvoir constituant, par lequel, depuis la Révolution française, nous sommes habitués à penser les grands changements politiques, se substitue celui d'une puissance destituante, qui ne se laisse jamais réabsorber dans un pouvoir constitué. À chaque fois, dans la tentative pour définir, au-delà de toute biographie, ce qu'est une forme-de-vie, l'analyse des concepts recoupe l'évocation de la vie de quelques personnages décisifs de la pensée contemporaine.
Giorgio Agamben
Philosophe, il a enseigné à l'université de Venise. Il est l'auteur d'une œuvre considérable.
Traduit de l'italien par Joël Gayraud
Proposition d'illustration de couverture : Titien, La Bacchanale des Andriens, Musée du Prado, Madrid.
Opus Dei, l'" œuvre de Dieu " est l'expression qui désigne tout au long de l'histoire de l'Église catholique la liturgie, c'est-à-dire l'office du prêtre à qui incombe le " ministère du mystère ". Cette œuvre n'est-elle pas, en apparence, ce qu'il y a de plus séparé des pratiques qui régissent la vie des individus et des sociétés modernes ?
C'est cette séparation que l'enquête archéologique de Giorgio Agamben se propose de démasquer, en dévoilant les filiations inattendues et les liens cachés qui l'unissent à la modernité.
Comprendre le mystère de l'office signifie alors saisir l'influence considérable que cette pratique a exercée sur la manière dont notre culture a conçu son éthique comme sa politique, son économie comme son ontologie. Car le mystère de l'office n'est autre que le mystère de l'efficacité, à l'intérieur duquel ce que l'homme est se résume dans ce qu'il a à faire et où tout acte est un acte d'office. Du fonctionnaire au militant politique, de l'officier au professionnel, le paradigme de l'office n'a cessé de modeler la praxis des hommes : plus efficace que la loi, parce qu'il ne peut être transgressé ; plus réel que l'être, parce qu'il ne consiste que dans l'opération par laquelle il se fait réalité ; plus absolu que toute action humaine, parce qu'il agit indépendamment des qualités du sujet qui l'exerce.
Giorgio Agamben est philosophe. Son œuvre est mondialement connue. Parmi ses livres les plus récents, indiquons : Nudités (Rivages, 2009) et De la très haute pauvreté (Rivages, 2011). Opus Dei s'inscrit dans le projet Homo Sacer dont plusieurs volumes ont été publiés aux Éditions du Seuil : Homo Sacer, I, Le pouvoir souverain et la vie nue (1997), État d'exception, Homo Sacer II, 1, (2003), Le Règne et la Gloire, Homo Sacer, II, 2 (2008).