Inscrit dans les gènes de tous les animaux sociaux, le soutien mutuel est reconnaissable aussi bien chez les chimpanzés qui s'épouillent les uns les autres que chez les enfants qui construisent un château de sable ou les hommes et les femmes qui amassent des sacs de terre pour parer à une inondation soudaine : tous coopèrent pour accomplir ce qu'ils ne peuvent faire seuls.Cette tendance naturelle, innée, est pourtant moins un trait génétique qu'un art, une capacité sociale, qui requiert un rituel pour se développer. Dans un monde structuré par la concurrence, où la compétition prime toujours sur l'entente, savons-nous encore ce que c'est qu'être ensemble, par-delà le repli tribal du « nous-contre-eux » ?Dans ce deuxième volet de la trilogie qu'il consacre à l'Homo faber, Richard Sennett, se fait tour à tour historien, sociologue, philosophe ou anthropologue pour étudier cet atout social particulier qu'est la coopération dans le travail pratique. De la coordination des tâches dans l'atelier de l'imprimeur aux répétitions d'un orchestre, il nous fait découvrir de nombreuses expériences de communauté et d'action collective qui permettent de proposer une vision critique des sociétés capitalistes contemporaines. La richesse des références, l'originalité des points de vue, la liberté du style et la volonté de rester toujours au niveau de l'expérience quotidienne font la force de ce livre singulier et engagé. Et si, pour sortir de la crise, il suffisait de réapprendre à coopérer ?
Richard Sennett, Bâtir et habiter. Pour une éthique de la ville
De l'antique cité d'Athènes aux villes ultramodernes du XXIe siècle, comme New York et Shanghai, la réflexion passionnante de Richard Sennett porte sur la relation entre la forme construite, la ville, telle qu'elle est conçue par les urbanistes, et la manière dont nous l'habitons. Partant du constat que la configuration de l'espace urbain peut enrichir ou aussi bien contrarier la vie quotidienne de ses habitants, ce livre répond à une urgence propre à la politique des villes aujourd'hui : Comment conjoindre la forme et le fond ? Comment être heureux en ville ? Quelles sont les dispositions particulières qui nous permettent, en dépit de nos préjugés, de nos habitudes, de vivre avec les autres ? Mobilisant tous les savoirs urbanisme, littérature, sociologie, philosophie, Richard Sennett montre que la clé réside dans l'élaboration d'une éthique de la ville. Et cette éthique, selon lui, tient en un mot : l'ouverture ; l'ouverture d'esprit des individus et l'ouverture de la forme bâtie qui favorise la sociabilité. « L'urbain compétent » est alors celui qui est capable de sortir de son isolement, d'aller à la rencontre de l'autre, et de jeter un regard toujours renouvelé sur le monde qui l'entoure. Richard Sennett est professeur à la London School of Economics. Ses essais, primés à de nombreuses reprises, l'ont imposé en Europe comme l'une des figures les plus originales de la critique sociale aujourd'hui. Bâtir et habiter est le dernier volet d'une trilogie parue chez Albin Michel, après Ce que sait la main (2010) et Ensemble (2014).