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Paul Fournel
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Le temps passe, le village change. La ville se rapproche et Claudine devient riche. En ville, être riche c'est aller au massage, se faire livrer à manger par de jeunes cyclistes, c'est faire les vitrines chaque jour, c'est porter une robe différente par semaine, c'est aller au restaurant quand ça vous chante, c'est arrêter un taxi d'un geste de la main. Au village, être riche consiste à cacher son argent et à s'arranger pour donner des imaginations, des envies et des jalousies sournoises à tout le monde. Entre les deux, Claudine hésite.
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J'avais dix ans, j'étais petit, brun et rond; il était grand, blond et mince et je voulais être lui. Je voulais son vélo, son allure, sa nonchalance, son élégance. J'avais trouvé en même temps mon modèle et mon contraire.
Jacques Anquetil a traversé mon enfance cycliste comme une majestueuse caravelle. Il était le plus beau cycliste possible. Je l'ai suivi, je l'ai admiré sans jamais chercher à le comprendre, ajoutant du mystère à son mystère. Il avait l'âme complexe, ses motivations étaient contradictoires, son élégance tranchait dans le peloton, sa vie de château sentait le parfum et la poudre.
Bien plus tard, parce que mon admiration ne s'est jamais éteinte, l'idée me vint de lui tirer le portrait. Mais ce cycliste de génie aimait-il vraiment le vélo ?
Né en 1947 à Saint-Étienne, président de l'Oulipo, Paul Fournel a publié des romans, des recueils de nouvelles et de nombreux ouvrages pour la jeunesse. Il est aussi l'auteur d'un essai, Besoin de vélo (2001) et, plus récemment, de Méli-Vélo (2008), un dictionnaire cycliste.
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Enfourcher son premier vélo, c'est entrer dans une langue que l'on mettra sa vie à assimiler, c'est transformer chaque geste en un secret pour le piéton. Prêt à mouliner, prêt à gicler, à coincer, à bâcher, à sucer les roues, à pointer le nez à la fenêtre, prêt à avaler des bornes et des bornes pour entrer dans le clan édénique des moelleux...
Enfourcher un vélo, c'est entrer dans une histoire et une légende que l'on découvrira dans mille et mille numéros de L'Equipe. La divine solitude du cycliste est peuplée d'ombres que le soleil étire sur le grain des routes. Assis sur ma première selle, j'apprenais à sentir le souffle du grand peloton des cyclistes du temps et du monde.
Enfourcher un vélo, ce n'est pas monter sur une machine pour l'oublier, c'est, au contraire, entamer un débat permanent avec elle. Au moment où je coince dans une bosse, je lance un regard inquiet sur le pédalier du salaud qui me double : j'en étais sûr, il est ovale et il a des manivelles de 175 !
Enfourcher un vélo, c'est prendre possession du paysage. D'abord celui de ma roue avant, ensuite celui des jambes de mon père (qui sont les jambes que je connais le mieux au monde), enfin le vaste paysage quand l'équilibre et la forme sont là.
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Il n'y a pas meilleur endroit que la campagne pour écrire des polars ruraux. C'est pour cette raison que Gabert s'exile dans la Haute-Loire pour inventer en paix les horreurs de son monde noir. Il va découvrir la vie au village, les vérités de la grosse Claudine, les désarrois de Lune, les jeux de Marsou le Preste, et la verdeur de la petite Magali. Il apprend un nouveau rythme et de nouvelles façons d'être, mais de loin, Jeune-Vieille et Paris veillent sur lui.
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Le peloton est la maison mobile des coureurs. Une maison colorée et féline qui s’étire, qui se rassemble, qui se faufile, qui dessine la route et la course. Il y a autant de façon d’habiter cette maison que de coureurs. Certains s’y reposent, d’autres s’y cachent, certains y font le ménage, d’autres vont mettre le nez à la fenêtre. Les plus hardis et les plus éprouvés s’en échappent. Mais tous, toujours, s’y rassemblent chaque petit matin.
Paul Fournel, écrivain, poète, éditeur, membre de l’Oulipo, est notamment l’auteur au Seuil et en Points de Besoin de vélo, du dictionnaire cycliste Méli-Vélo et d’Anquetil tout seul. -
Qu'y a-t-il dans la tête d'un skieur en haut d'une piste ? Dans celle d'un footballeur avant de tirer au but ? Et d'un cycliste tellement saoul qu'il ne voit plus la route ? Fascinés par l'exploit, les sportifs sont prêts à tout pour une minute de gloire. Dressés au combat, ils n'en restent pas moins fragiles : des joies et des doutes les traversent, car du triomphe à à la chute, il n'y a qu'un pas...Paul Fournel, écrivain, poète, éditeur, président de l'Oulipo, est notamment l'auteur de Foraine (prix Renaudot des lycéens) et de Poils de cairote, disponibles en Points.Bourse Goncourt de la nouvelle 1989Grand Prix de la littérature sportive 1988
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La stagiaire entre dans le bureau de Robert Dubois, l'éditeur, et lui tend une tablette électronique, une liseuse. Il la regarde, il la soupèse, l'allume et sa vie bascule. Pour la première fois depuis Gutenberg, le texte et le papier se séparent et c'est comme si son coeur se fendait en deux.
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Pendant longtemps on a cru que le méchant était Ray Duluc. Il faut dire qu'il avait le profil : des meurtres, des vols de pâtisseries (cookies, flans), des faux en écriture, des rôdes sur le darknet et les sorties d'école. Ce n'était pas exactement un bon bougre. Mais comme a dit la cheffe : ' Ça n'en fait pas pour autant un coupable - en tout cas pas coupable de ça.
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De novembre 2000 à juin 2003, j'ai vécu au Caire. Cinq fois par semaine, chaque petit matin et sans jamais faillir pendant plus de cinq cents jours, j'ai donné des nouvelles à quatre-vingt-dix-huit amis. Je me levais tôt. J'écrivais à la main. Je tapais sur mon écran. J'envoyais. Sans me retourner, sans me lire ni me relire. Le reste du jour, je me tenais sur le qui-vive, guettant la chose vue, vécue ou entendue, qui serait le "poil de cairote" du lendemain.
Je ne savais rien de l'Égypte et je m'y trouvais soudain pour travailler. Je me doutais simplement que c'était un ailleurs fort. De moi, je savais que j'étais une machine occidentale assez finement réglée et que j'enchaînais sur quatre années passées à San Francisco. On ne pouvait guère rêver changement plus radical, ni surtout changement plus radicalement inscrit dans l'Histoire en train de se faire. Mon attention ne s'est pas portée sur les grands mouvements historiques, pas davantage sur le passé de l'Égypte, encore moins sur les mystères fumeux qui enrobent la recherche archéologique lorsqu'elle prétend racoler le grand public. Tout cela m'a intéressé, mais ce n'est pas ce dont je voulais entretenir mes amis. Je souhaitais, plus banalement, leur donner un regard quotidien sur Le Caire, dire ce que je voyais avec mes yeux malhabiles et partisans d'occidental, et le faire avec une régularité de métronome qui garantissait une certaine présence des intermittences du coeur, des sautes d'humeur, des semaines creuses et des jours pleins.
Paul Fournel
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On le fait.
On reproche aux autres de le faire.
On demande à nos enfants de ne pas le faire, mais on les amène le voir.
On ne comprend pas pourquoi ils hurlent devant le bonhomme de bois.
On le brandit pour protester. Dans la presse, à la télé.
On l'expose à Lyon comme un symbole.
Mais un symbole de quoi, de qui ?
Guignol existe, il est là, parmi nous, depuis toujours.
Il appartient à tous.
Mais il a bien fallu que quelqu'un l'invente un jour. -
Geneviève se souvient de tous les moments où son désir d'écrire a grandi avec elle, avec la petite fille turbulente, avec la jeune amoureuse cinéphile, avec l'étudiante maladroite et la femme pressée. Son rêve est accompli : elle écrit. Elle publie des livres. Elle a un grand éditeur, Robert Dubois, qui est devenu l'homme le plus important de sa vie. Il n'est pas un mari, il n'est pas un amoureux, il n'est pas un parent, il n'est pas un confident, il est son éditeur. Et elle va le trahir.
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La vie est paisible au " Village Fondamental ". Les hommes chassent et les femmes travaillent aux champs. La belle Chamboula, à la démarche élastique, provoque de grandes élévations.Un jour arrive un réfrigérateur au centre du village, et très vite, on en vient à se battre pour être le premier à s'y rafraîchir. Une télévision arrive ensuite qui rivalise avec l'arbre à palabre.Le village plonge dans la mélancolie et la faim. On ne se parle plus.SAV (" service après-vente ") débarque et ne tarde pas à lorgner sur Chamboula, et à gratter le sol et le sous-sol.Il embauche Boulot, mais Boulot décide d'aller tenter sa chance de l'autre côté de la forêt, et s'éloigne encore, et voyage. Va-t-il se faire coincer à la douane française, ou s'installer clandestinement à Paris ? Entrera-t-il dans Paris par le métro Château d'eau ou par la rue d'Ulm ? S'inscrira-t-il à Sciences-Po ? Jouera-t-il à l'aile droite de l'ASSE ?
Dès lors le récit prolifère, se ramifie, en une fable jubilatoire. Et la dimension politique du roman se double d'un travail poétique et formel qui inscrit Chamboula, récit à la construction arborescente, dans la tradition ludique de la littérature oulipienne.
Né à Saint-Étienne, Président de l'Oulipo, Paul Fournel a publié de nombreux ouvrages parmi lesquels Les Athlètes dans leur tête (Bourse Goncourt de la nouvelle), Foraine (Renaudot des lycéens) et Poils de cairote.
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Elles rêvent : Jeannette de l'homme riche et beau qui dansera avec elle ; la petite Madeleine de livres interdits, et la dame de la Grande Maison de pâtisseries. Ces villageoises, frivoles ou romantiques, obsédées par la cellulite ou la danse, se nourrissent de potins et vivent de songes. Leur monde est sacré, et ce n'est pas la voisine qui y mettra les pieds...
Né en 1947, Paul Fournel intègre l'Oulipo grâce à Raymond Queneau avant d'en devenir le président en 2004. Il s'engage particulièrement dans le monde littéraire à travers son métier d'éditeur, son statut de président de la Société des gens de lettres, mais surtout en tant qu'écrivain, poète et auteur dramatique. Il a publié de nombreux ouvrages dont Besoin de vélo, Poil de Cairote ou encore Les Athlètes dans leur tête, tous disponibles en Points.
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On se regarde, on se fait voir. On brille, on brûle et on s'éteint.
Petits triomphes de hasard ou gros succès taillés sur mesure, la gloire connaît ses lendemains.
Vedette d'un instant, champion d'un jour, le pêcheur d'esturgeon, la mariée napolitaine, le quarterback et le rocker, le lanceur de couteau, la trapéziste, l'amoureux transi, la boulangère, passent tour à tour dans la lumière et doivent en payer le prix.
Après les strass, viennent les bleus, les courbatures : c'est le système des stars.
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" Il fait beau. Tu me dis que paris danse et que la lumière est pour toi. Les gens de la rue te regarderont passer, tu seras belle. Tu sais que tu tournes dans quinze jours. Tu es une comédienne sans souci. Tu devines que, partout, des caméras te cherchent, partout des auteurs fabriquent des mots pour toi. En leur honneur, tu te choisis une jupe courte et je te surprends au moment où, juste avant de sortir, tu donnes un tour supplémentaire à ta ceinture, pour que la jupe paraisse plus courte encore ".
Elle est comédienne. Il l'aime quand elle tourne. Il l'aime quand elle ne tourne pas. Il la regarde : jouer, attendre, répéter, espérer, mentir comme son métier l'exige, fair une bonne ou mauvaise figure. Lui n'a pas d'autre rôle à jouer, pas de ligne à apprendre. Il la regarde pour mieux la garder.
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La fête au complet, ce sont tous les plaisirs au même endroit : manger, tirer au fusil, conduire à gauche, tamponner son prochain, boire des coups à l'œil, avoir de la chance, pouvoir fourguer les mômes sur un manège avec une poignée de jetons, se rincer l'œil et tripoter les filles en douce.
On compte donc : une baraque de crêpes-gaufres et frites, un tir, des autos tamponneuses, une loterie, un carrousel pour les petits, une baraque à mystères, une chenille. Et le tout en couleurs, en lumière et en musique.
Pour se mettre à l'unisson, le village a ressorti ses guirlandes de Noël et de quatorze juillet. Il est pavoisé de petits drapeaux triangulaires bleus, blancs et rouges qui partent de la mairie et descendent tout au long de la rue principale.
Les commerçants ont fait des frais de vitrines et les deux bistrots ont ajouté des tables à leur terrasse. L'épicier a sorti son frigo sur le trottoir et le remplit de canettes.
Les retraités se lèvent lentement de leur banc pour rentrer en boudant.
Ils sont trop raides pour les autos tamponneuses, trop myopes pour le tir, trop barbouillés pour les gaufres, trop avares pour la loterie.
Tout est en place pour l'entrée en scène de l'héroïne, la jolie Foraine, la bien-nommée. Belle à ravir et cœur à prendre.
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La recette de cuisine n'est pas le plat, mais elle est la mémoire du plat et sa potentialité. Entre les deux, s'agite le cuisinier qui respecte ou qui transgresse, qui routine ou qui crée.
La forme est la mémoire du poème. Entre les deux, s'escrime le poète qui respecte ou qui transgresse, qui routine ou qui crée.
Les poèmes réunis dans Le Bel Appétit sont des poèmes de table, des souvenirs de sauces, des parfums de ragoûts, des caresses de fruits. Ils sont improvisés selon les trouvailles du marché ou bien ce sont des recettes anciennes, rondel, villanelle, pantoum, terine, sonnet, étreinte, ballade, comme autant de légumes dans le pot du Bel Appétit. -
Le vélo est une langue. Une langue où tout se mêle dans l'essoufflement de l'effort. Une langue de cris, une langue d'alerte et de joie qui se perd dans le silence de la montagne et se retrouve au coin du bois. Une langue du soir, paisible, qui raconte et reraconte le souvenir des grands et des petits exploits.
Je la parle couramment depuis mon enfance, et la voici rangée de A à Z. Ce petit dictionnaire fait la part belle aux mots du peloton : on y flingue, on y bâche, on y gicle ; mais aussi aux coureurs que j'admire, les Robic, les Anquetil, les Merckx ; aux montagnes que je grimpe, l'Izoard, le Galibier, le Tourmalet ; aux batailles héroïques des grands Tours et aux balades du dimanche dans la vallée de Chevreuse.
C'est l'abécédaire d'une passion tranquille pour le vélo cet engin merveilleux qui vous emmène sans bruit, plus vite que vous-même, jusqu'au bout de la route.
Paul Fournel
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Qui, de la grande ou de la petite, s'amusera le plus ? Quand la vieille dame de la " Grande Maison " demande à rencontrer la jeune Maline, celle-ci est intriguée. Et un peu inquiète. Que lui veut-on ? Voilà une bien étrange mission. La petite, pourtant, s'y adonne avec tout son cœur, et le jeu devient bientôt une tradition à laquelle elle ne dérogerait pour rien au monde.
Un joli récit d'amitié entre générations, plein de malice et de tendresse.
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Passionné de cyclisme, Paul Fournel met ici en scène le quotidien - quelquefois surprenant - des grands champions de la petite reine. En sept textes courts et bien sentis, il pénètre dans les têtes de ces athlètes hors du commun, parfois avec une certaine malice. Car avoir les cuisses en bois n'empêche pas de se laisser happer par le regard d'une belle inconnue croisée sur la route du Tour, et avoir été à plusieurs reprises vainqueur de la Grande Boucle ne prémunit pas des cuites, que l'on cuve en pédalant...
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Tous les lecteurs de la Beat Generation connaissent les poèmes de Jason Murphy, mais le bruit court qu'il aurait composé un roman, écrit sur un rouleau avant même le célèbre Sur la route de Jack Kerouac. Certains affirment que le professeur Marc Chantier l'aurait eu un moment en sa possession.Un éditeur et une étudiante s'envolent sur la trace du fameux « scroll » de Paris à San Francisco. Chacun a ses raisons, chacun a ses chemins, chacun a ses moyens et c'est à qui arrivera le premier...Que cherche-t-on quand on s'intéresse de près à un auteur de la Beat Generation comme Jason Murphy ? Veut-on percer le mystère d'un texte parmi cent mille ? Le secret d'un homme en révolte ? Les différences avec Kerouac ou Ginsberg ? Les mystères d'une époque et d'un lieu devenus mythiques ? Cherche-t-on une vérité ou un mensonge ? Se cherche-t-on soi-même ?Chacun des personnages de ce roman construit un Jason Murphy à sa mesure ajoutant à son mythe et épaississant son mystère à mesure que s'éloignent les fumées du « Summer of love » dans le Golden Gate Park de San Francisco. Ainsi se tournent les pages d'une histoire de la littérature.
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Réponse à M. Dupanloup
Paul-Mathieu Laurent, Adolphe Gueroult, Barthelemy-Francois Arles-Dufour, Henri Fournel, Arthur Enfantin
- Collection XIX
- 17 Février 2016
- 9782346046706
MONSIEUR L'ÉVÊQUE,Un de vos plus illustres confrères de l'Académie, prodigue comme vous des richesses d'un admirable talent pour couvrir les infirmités d'une orthodoxie sénile, et condamné comme vous à épuiser les dernières forces d'un esprit superbe et passionné à retenir les dieux qui s'en vont, M. Guizot, premier ministre d'un roi qu'on ne confessait pas, selon le mot d'un autre académicien, M. Dupin, aîné, mort jeune d'esprit à plus de quatre-vingts ans ; M.Fruit d'une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.