Ciel variable numéro 97 nous présente une « Galerie de portraits » bien particulière. En effet, que peuvent bien avoir en commun les portraits de ces gens ici rassemblés (gitans, mineurs, aristocrates, modèles, noctambules...), si ce n'est que les moyens mis en oeuvre par les photographes leur confèrent une certaine dignité? Les trois artistes présentés ici - Pierre Gonnord, Christian Tagliavini, Gabriel Coutu-Dumont - sont aussi unis par une démarche singulière : le croisement de références et de savoir-faire photographiques et picturaux qui s'incarne dans les clairs-obscurs, les cadrages, les poses, les textures et le drapé des vêtements, les ports de tête et, par-dessus tout, les regards. Reposant sur une grande maîtrise des moyens, le travail de ces artistes témoigne d'un regard aigu et sensible sur la multiplicité des existences.
Portant sur la notion d'habitat, le dossier du numéro 99 de Ciel variable juxtapose les travaux récents de Normand Rajotte et de Stephen Gill, deux photographes qui se démarquent par une pratique du terrain particulièrement adaptée à leur objet d'investigation. Rajotte observe les moindres variations d'un territoire familier qui s'est vu récemment transformé par l'activité des castors, tandis que Gill s'intéresse à la vie urbaine des pigeons sous les ponts. Ce dossier est complété par les oeuvres de plus jeunes artistes, Allison Tweedie et Steve Veilleux, dont les investigations passent par le relais d'images trouvées. Aussi dans ce numéro, le travail de Valérie Jouve avec quatre palestiniennes, la photographie oubliée de Béla Egyedi, un compte-rendu de l'événement PHotoEspaña et le magazine parodique Art Système.
Le dossier thématique intitulé "CYBER / ESPACE / PUBLIC" examine un certain nombre d'enjeux liés au régime numérique des images et à leur circulation sur les réseaux. Réalisé sous la direction de Suzanne Paquet, on y traite entre autres des possibilités de relecture et de recontextualisation des images contenues dans les immenses banques de données visuelles telles que YouTube (La trilogie du Web, Dominic Gagnon), Google Street View (9-eyes, Jon Rafman), ou le Web tout entier. À lire aussi dans ce numéro, une réflexion de Pierre Dessureault sur la photographie de guerre dans les oeuvres de Don McCullin (Collision) et Hélène Doyon (Dans un océan d'images), une critique de Philippe Guillaume sur la récente exposition de Lynn Cohen au MAC et un entretien avec Paul Wombell sur Drone : l'image automatisée, thème qu'il a choisi pour le Mois de la photo de Montréal 2013.
En géologie, le concept de stratification renvoie à l'idée d'un processus au cours duquel des sédiments s'accumulent en couches, pour éventuellement former des ensembles sédimentaires plus ou moins hétérogènes, mais qui n'en demeurent pas moins des unités de sens à part entière. Ainsi en va-t-il de certaines images, dont la compréhension suppose un effeuillage des différentes strates de signes qui les constituent. À ce titre, les séries Scarti d'Adam Broomberg et Oliver Chanarin, Copperheads de Moyra Davey ainsi que les Études préparatoires de Marc-Antoine K. Phaneuf, auxquelles Ciel variable consacre la section thématique de ce numéro, ont ceci en commun qu'elles sont le fruit de processus de stratification. Ces oeuvres permettent d'apprécier comment l'ajout de signes peut modifier, enrichir ou court-circuiter la nature et le sens d'une image.
Pour son édition automnale, Ciel variable s'intéresse à la thématique de la ruine et s'attache à capter les traces d'un monde en train de disparaître, un monde où la mutation de l'image photographique s'inscrit dans une transformation plus fondamentale qui affecte l'ensemble de la culture et des valeurs de nos sociétés. La section Portfolio présente en ce sens The Donkey that became a zebra de Michel Campeau, Fin de siglo d'André Barrette et Trauma de Joan Fontcuberta.On retrouve également dans ce numéro des essais sur les expositions d'Emanuel Licha, au Musée d'art contemporain de Montréal, de Katia Kameli, Délio Jasse et Vasco Araùjo, à Londres, et les Archives du Service de la photographie de l'ONF, de même qu'une entrevue de Claude Goulet des Rencontres internationales de la photographie en Gaspésie, et, dans la section Actualités, plus d'une dizaine de recensions d'expositions et de publications récentes.
Trois expositions récentes offrent à la revue Ciel variable l'occasion de jeter un regard inusité sur l'acte de collectionner. Serge Clément présente, avec Archipel, la collection de tous les livres photographiques qu'il a conçus, livres que l'on peut comprendre comme des mises en séquence de collections de ses propres images. Avec Tout ceci est impossible, Bertrand Carrière plonge dans la collection de la Cinémathèque québécoise en s'intéressant au film noir dont il extrait des images-types tout en explorant les jeux de temporalités propres au fondu enchaîné. Enfin, la collection Lazare représente avec États d'âmes, esprit des lieux un exemple assez rare d'une collection rassemblée patiemment au fil des ans pour refléter une vision teintée de mélancolie sur un monde en difficultés. La rubrique « Focus », elle, propose d'explorer le documentaire Le tribunal sur le Congo de Milo Rau, la 22e édition de Paris Photo, Anthropocene fatigue d'Edward Burtynsky et In Pursuit of Magic, exposition rétrospective du travail de Nathan Lyons.
Pour son édition hivernale, le magazine Ciel variable rassemble de grands portfolios d'oeuvres récentes de Dominique Blain, Alain Paiement, Gisele Amantea et Mélissa Pilon autour du thème « Masses et monuments ». Ce dossier thématique « pose un regard sur l'action collective dans nos sociétés. Sur fond de conflits sociaux et de guerres, les oeuvres évoquent l'impact de nos agissements collectifs sur le bien commun en auscultant la masse d'images médiatiques qui tissent notre rapport au monde. » Également au sommaire : des articles de fond sur le photographe et expérimentateur Stephen Gill, sur l'exposition Ghost Ranch de Geneviève Cadieux (Galerie René Blouin), ainsi que sur la scène photographique dakaroise. Retrouvez aussi des comptes-rendus d'expositions récentes dont Rebecca Belmore (MACM), Janick Burn (Plein Sud), Yan Giguère (Galerie La Castiglione), Michel Depatie (Centre d'exposition de Val-David), la Biennale de Venise 2019, Territoire II (Galerie La Castiglione), Le projet Polaroid (Musée McCord) et The Way She Looks (Ryerson Image Centre).